Le Moyen-Âge érotique

Et si le Moyen Âge n’était pas aussi prude qu’on le croit ?
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Pendant mille ans, entre châteaux et monastères, troubadours et clercs, se dessine une véritable cartographie du désir. Derrière les murs d’églises, entre les lignes des poèmes et les notes des vièles, l’amour se chante, se murmure, se négocie… et se vit, parfois, avec une liberté insoupçonnée.
Dans cet épisode, on explore un Moyen Âge sensuel, raffiné, provocant aussi. Un monde où l’érotisme se décline en art, en langage et en musique.
Bienvenue dans l'émission Le Moyen-Âge érotique !
Le Moyen Âge, souvent caricaturé comme une époque sombre et puritaine, est en réalité traversé par une véritable effervescence autour du désir, du corps et de l’amour. Loin d’être une parenthèse d’austérité, ces mille années ont inventé des formes d’expression érotique singulières, parfois même en rupture avec les dogmes de l’Église. C’est ce Moyen Âge-là que cette émission explore : un Moyen Âge sensuel, poétique, mystique et charnel.
Tout commence avec l’héritage gréco-romain. Le désir, pensé comme un manque chez Platon ou comme une chasse chez Ovide, inspire durablement l’imaginaire médiéval. Mais l’invention majeure du Moyen Âge, c’est l’amour courtois. Né dans les cours d’Occitanie vers le XIe siècle, il révolutionne la manière de penser l’érotisme : le sentiment amoureux devient raffiné, codifié, et profondément marqué par la figure dominante de la femme. C’est elle qui décide, impose l’attente, oriente le désir. Le troubadour chante la dame comme on sert un seigneur, dans un jeu de regard, de souffle et d’émotions où l’acte sexuel est souvent différé, magnifié par l’attente.
Cette culture du désir s’incarne aussi dans une musique puissante et sensuelle, indissociable des mots. Les troubadours trouvent dans l’union du chant et de la poésie une voie pour exprimer une sensualité à la fois raffinée et brûlante. Le corps, dans ce contexte, n’est pas absent : il est suggéré, caressé par le verbe et la musique. On parle de mains sous les manteaux, de regards qui pénètrent le cœur, d’amants nus couchés l’un contre l’autre… mais toujours dans un équilibre délicat entre mesure et passion.
Parallèlement, une mystique amoureuse s’épanouit dans les marges de l’Église, où certaines femmes, saintes ou visionnaires, décrivent leurs extases avec un langage érotisé. L’amour de Dieu se fait fusion, baiser divin, union des âmes. Le désir traverse donc toutes les sphères, profanes et sacrées, et se glisse jusque dans les manuscrits religieux, où des dessins licencieux voisinent avec les textes saints.
Au fil des siècles, l’érotisme médiéval se fait polymorphe : raffiné dans les cours, cru et comique dans les fabliaux, transgressif dans les marges, mais toujours vivant. Il témoigne d’une liberté intérieure, d’un imaginaire en mouvement qui interroge aussi notre époque : avons-nous vraiment libéré le désir, ou l’avons-nous simplement reconditionné dans des images, des produits, du virtuel ?
À travers chansons, poèmes, récits, et réflexions philosophiques, cette émission nous plonge dans un Moyen Âge bien plus sensuel et complexe qu’on ne l’imagine. Un temps où l’érotisme n’est pas un tabou, mais un langage — parfois codé, parfois flamboyant — pour dire le trouble du corps, la beauté du geste, et la puissance du sentiment.